Durant les années 1930, deux grands camps de bûcherons (camp à Jos Lévesque et camp à Jack Borden) voient le jour sur les rives du ruisseau Creux. Ces camps, pouvant accueillir de 50 à 60 bûcherons, étaient équipés d’une « cookerie » et d’une forge. Les bûcherons coupaient le bois de cèdre en 16 pieds (4.88 m) pour construire des rails de chemin de fer.
À cette époque, les bûcherons coupaient le bois au sciotte ou à la hache. Ils utilisaient principalement les bœufs pour transporter le bois jusqu’au ruisseau ou à la rivière. Par la suite les chevaux ont remplacé les bœufs. Plusieurs pionniers de St-Alphonse ont travaillé dans ces chantiers.
En aval de la chute du ruisseau Creux, un barrage de terre et de bois avait été construit. Lors de la drave, le barrage était fermé durant la nuit pour accumuler l’eau et le matin venu, on ouvrait le barrage pour augmenter temporairement le débit d’eau du ruisseau Creux, afin de faire circuler plus facilement les billots de 16 pieds.
Durant les années 1940 et au début des années 1950, les grands camps sont remplacés par de petits camps familiaux dispersés le long du ruisseau Creux. Ces petits camps logeaient 4 à 8 personnes selon la grandeur de la famille. Souvent au printemps, ces camps étaient brûlés et on en reconstruisait un autre l’automne suivant à un autre endroit pour se rapprocher du lieu de bûchage. Plusieurs familles ont eu leur camp dont Édouard Bernard, Eugène Bernard, Maurice Lebrun, Aderville Cyr et Hector Barriault et plusieurs autres.
Les arbres étaient coupés en 4 pieds (1.22 m) et transportés près du ruisseau Creux par les chevaux. Au printemps, les billots étaient dravés sur le ruisseau Creux et la rivière Bonaventure jusqu’à la Baie-des-Chaleurs. Finalement, les billots étaient acheminés par les toueurs jusqu’à l’usine de Bathurst au Nouveau Brunswick.
Les bûcherons apportaient leur nourriture pour la semaine ainsi que le foin et l’avoine pour les chevaux. La semaine de travail commençait le lundi matin et se terminait le samedi midi. Les hommes travaillaient du lever au coucher du soleil.
La drave consistait à transporter les billots par eau jusqu’à l’usine de sciage. Les draveurs circulaient sur les billots flottants et à l’aide d’un long pieu décoinçaient les billots. Métier très dangereux, car les draveurs étaient toujours en équilibre précaire sur les billots gelés et les accidents étaient fréquents. Charles Bernard, Pierre Labrecque, Franck St-Onge et plusieurs autres ont été draveurs dans les années 1950.
La principale difficulté que les draveurs rencontraient est la gorge du ruisseau Creux d’environ 8 mètres de largeur où une chute de près de 9 mètres avait pris place. À cet endroit le bois s’amoncelait et créait des embâcles. Des hommes étaient engagés pour faire sauter à la dynamite ces embâcles. Le dynamitage à répétition a contribué à creuser encore plus la gorge du ruisseau Creux. Ce mode de transport des billots a commencé dans les années 1930 jusqu’à 1955.
En 1950, l’invention de la scie mécanique révolutionne l’industrie et facilite de beaucoup la vie des bûcherons. En 1955 le syndicat forestier construit une route permettant d’accéder au nouveau grand camp construit en 1954 d’une capacité de 80 hommes près de la rivière Bonaventure. Les coupes de bois étant loin du ruisseau Creux, il en résulta l’abandon du ruisseau Creux comme voie de transport.
Plus tard, le territoire situé à proximité du ruisseau Creux fut exploité dans les années 1965 à 1969 par la Consolidated Bathurst dont l’usine fut érigée à New Richmond en 1966. Durant ces années, la compagnie a construit un pont pour le transport de bois, pont qui était situé à la passerelle.
Les bûcherons travaillaient avec des scies mécaniques et les chevaux sortaient les billots jusqu’au chemin forestier. Ayant des chemins d’accès, les hommes revenaient chez eux chaque soir. Les billots étaient transportés par camion jusqu’aux usines de sciage. Vers la fin des années 70, les chevaux ont été remplacés par des débusqueuses.